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CHRONIQUE: C'est au Bénin que n'importe qui s'autoproclame analyste politique

Publié par Noé DOTOU

 

       C'est au Bénin que les moutons vont à la chasse au milieu des chiens aguerris, nantis de compétences rares. Par  parallélisme, je pense ainsi à *Expédit Ologou*. Je pense à *Victor Prudent Topanou*. Je n'oublie pas *Vincent Foly* et *Jérôme Carlos*. Bien évidemment, sans mettre sous le boisseau les mérites de *Léandre Wilfrid Houngbédji* malgré les interprétations  défavorables, du moins les rumeurs et les remous que nourrit aujourd'hui son identité professionnelle au sein de l'opinion publique depuis son affiliation au régime de la Rupture. Visiblement, ce paradoxe, comme un tsunami orageux, étend ses tentacules à grande échelle et, sans effroi prend en otage tous les niveaux d'activités, instances de réflexion et cadres de concertation du pays. Du Bénin qui voit impuissant,  sa prestance s'étioler sur le tas de la promotion perpétuelle de l'incontinence scientifico-professionnelle et des contre-performances. En clair, le terrain de la réflexion politique est devenu le nouveau bastion fertile à l'émergence des dérisions discursives et où les désœuvrés se remplissent de charisme fallacieux entretenu par l'illusion permanente. Du coup, le débat politique subit quotidiennement une fragmentation au relent digressif qui bat en brêche la  logique et  l'objectivité dans l'appréciation des sujets d'actualité politique sur les chaînes de radio, télévision, pire dans la presse écrite. 
         Au Bénin, rares sont ceux qui tiennent encore réellement la route. Sans aucun risque de me tromper, je parie que le professeur de droit constitutionnel *Joël Aïvo* n'opposera pas un avis contraire à ce constat.     
       Des comédiens incultes sortis ex nihilo, des intellectuels manchots, des cancres qui, dans leurs parcours n'ont pu jamais éliminer avec brio une seule UV à l'Université, le torse gonflé, les bras en parenthèses, viennent se ridiculiser  sur les plateaux en bons prétentieux analystes politiques. D'immenses propos creux nés  d'inspiration passoire de ces plaisantins sont caractéristiques de la pauvreté scientifique généralisée dont souffre le débat politique dans le Bénin de l'heure. Le malaise, aussi béant que varié qu'il soit, rivalise d'ardeur pour triompher dans les observations diverses de nos éminents analystes malgré les riches matières à réflexion qu'offre la vitesse effrénée de l'exercice de la politique  de la ruse et de la rage dans le contexte actuel. Dans la presse comme dans la sphère des supposés experts de la question, l'incultisme justifié par l'extrême impasse scientifique des débats fait dresser des cheveux sur le crâne du chauve au point de donner raison au fameux Président Patrice Talon qui eut affirmé, haut perché devant le corps diplomatique français que *le Bénin est un désert de compétence*. Des confusions doublées de ballades verbales, elles-mêmes dans le fond comme dans la forme, dominées par la suprématie d'un catalogue d'incantations incendiaires, on en lit. On entend. On en voit. 
         A la vérité, l'analyse politique ne doit pas être le reflet d'une observation  approximative dénotant l'usage vulgaire du discours ordinaire en proie à une prise de position fondée sur la passion et les attaques de personnes. Elle  suggère, sinon impose a priori dans une large proportion la connaissance de l'histoire des périodes marquantes qui structurent l'existence sociale, économique et surtout politique d'un pays. Non plus, elle n'inclut guère le fruit d'une improvisation à tout vent.
       Lorsqu’on s’intéresse à l’analyse  politique dite aussi de l'étude de l'action publique, on essaie de savoir en amont pourquoi le gouvernement, le parlement, ou l'ensemble des corps constitués des pouvoirs publics interviennent dans un domaine particulier afin de réguler par exemple les enjeux de sécurité ou encore des enjeux d’égalité salariale entre hommes et femmes ou encore le salaire de la fonction publique. En d’autres termes, lorsqu’on s’intéresse à l’analyse des politiques publiques, on s’intéresse à ce que fait le gouvernement, à la manière dont il fait et aux effets induits par les actions de l’État dans différents domaines que cela soit par exemple celui de la justice, de l'emploi, des finances, du commerce. Pourquoi l’État déciderait-il d’intervenir pour commencer à protéger, par exemple, les salles de spectacles, les espaces publics, le trésor public. Y a-t-il besoin d’intervenir?  Comment décide-t-il de le faire et quel est l’effet éventuellement dissuasif ou persuasif en termes de recul ou de progrès que l’on peut attendre des actions du Pouvoir régalien. Les analyses liées à ces différentes interrogations, dans une méthodologie cartésienne,  sont censées traiter  l’État au concret ou l’État et ses actions au concret que de sombrer dans les insultes prononcées, dans les spectacles dégoûtants auxquels on habitue les Béninois.
         En définitive, il est souhaitable que l'esprit du débat politique soit véritablement restauré pour mettre fin aux innombrables dégâts dangereux qui présentent toutes les susceptibilités d'enfoncer la démocratie béninoise dans un abîme sans fond. Si l'on n'aiguise pas les armes convenables dès à présent contre cette plaie, surtout dans les divers ordres de la presse, elle risque de  pourrir jusqu'à la gangrène incurable après avoir réussi à désacraliser la jouissance de la liberté d'opinion et de pensée,  un des droits suprêmes consacrés par la Constitution du 11 décembre 1990. La Hacc de *Boni Tessi*, l'Upmb de *Franck Kpotchémé*, le Cnpa de *Basile Tchibozo* et l'Odem de *Guy Constant Ehoumi* sont attendus sur ce vaste chantier.